En guerre contre le sexisme numérique : briser les chaînes de la sexualisation

Aujourd'hui, on se penche sur un thème sérieux, ce qui rendra notre style d'écriture naturellement plus sérieux et engagé. Dans ce monde connecté, il y a une tendance à réduire les femmes à des objets dans les médias numériques, alors qu’internet devrait ouvrir la voie vers plus d'inclusivité et de respect. Cet article plonge au cœur de cette réalité numérique, pour démêler comment ces images influencent notre vision de nous-mêmes et des autres.

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Représentation historique des femmes dans les médias numériques

Les médias, un miroir déformant

Les médias (publicité, télévision, magazines…) nous bombardent d'images de femmes, souvent réduites à de simples objets de désir. Mais soyons honnêtes, ces représentations, avec leurs poses suggestives et leurs tenues révélatrices, ne font qu'alimenter une vision superficielle des femmes. Ce n'est pas juste une question d'esthétique, mais de respect et de réalisme.

Des héroïnes stéréotypées dans les jeux vidéo

Et que dire des jeux vidéo ? Nos héroïnes virtuelles, souvent vêtues de tenues improbables et dotées de formes exagérées, semblent sorties d'un monde où la réalité n'a pas sa place. Ces stéréotypes, loin de n'être que de simples fantaisies, façonnent une image corporelle inaccessible et irréaliste.

Impacts sur la perception et l'estime de soi

Ces représentations, loin d'être anodines, teintent notre perception des femmes dans la réalité, affecte l’interaction sociale, ont un impact direct l'image corporelle et l'estime de soi des femmes et des jeunes filles. C'est en reconnaissant et en comprenant ces effets que nous pouvons commencer à démanteler ces stéréotypes nuisibles.

Impact sur la perception de l'image corporelle

Quand l'écran influence le miroir

T'est-il déjà arrivé(e) de te comparer à ces images parfaites sur les réseaux, dans les magazines ou au cinéma ? Tu n'es pas seul(e). Ces représentations idéalisées des femmes ont un effet puissant sur notre perception de notre propre corps. Pour beaucoup de femmes et de jeunes filles, le miroir du quotidien renvoie une image bien différente de celle glorifiée sur les écrans, ce qui peut ébranler l'estime de soi.

La réalité derrière les statistiques

Les études le confirment : voir tout le temps des images de femmes retouchées et sexualisées peut mener à ne pas se sentir bien dans sa peau. Les jeunes femmes exposées régulièrement à ces images ont tendance à être en insécurité par rapport à leur corps. C'est plus qu'une histoire d'apparence : ça touche à la confiance en soi et au bien-être mental.

Effets à long terme et répercussions psychologiques

Cet assaut d'images parfaites peut avoir des répercussions sur le long terme. Des études indiquent que cela peut conduire à des troubles de l'alimentation, de l'anxiété, voire à une dépression chez certaines personnes. La pression de correspondre à un idéal irréel est constante et épuisante, et elle peut sérieusement impacter la santé mentale.

Vers une maturité collective dans la perception des médias

Heureusement, la sensibilisation à la représentation des femmes dans les médias s'accroît, avec un appel croissant pour des images plus diversifiées et réalistes. Prendre conscience de cet impact marque un premier pas vers un progrès significatif, vers une meilleure image de soi et une estime personnelle renforcée.

On assiste à une évolution, passant de figures médiatiques comme Britney Spears, fréquemment sexualisée, à des influenceurs comme Lizzo, qui célèbrent la positivité corporelle et l'acceptation de soi.

Cependant, les médias influencent encore fortement la représentation féminine, comme l'illustre le concours de Miss France, perçu comme dépassé mais toujours populaire. Ce concours de beauté des Miss France parait donc vieillissent et en décalage avec la société actuelle, et pourtant, selon Médiamétrie, 7,54 millions de personnes l'ont visionnés cette année. Donc 41.9 % du public a regardé Miss France 2024, avec un paquet de chips, tout en commentant le physique et le parcours des candidates sur les réseaux sociaux. Ce genre de médias continue de promouvoir une compétition basée sur la beauté physique, reflétant une image dépassée de la féminité.

Cyberharcèlement et objectification

Quand le virtuel devient hostile

Le cyberespace, c'est un peu comme un grand terrain de jeu. Mais parfois, il se transforme en terrain miné, surtout pour les femmes. La sexualisation en ligne ne se limite pas à des images ; elle crée un environnement où le harcèlement devient monnaie courante. Les commentaires déplacés, les messages non sollicités et les jugements basés sur l'apparence sont des réalités quotidiennes pour beaucoup de femmes sur le net. Saviez-vous que 73 % des femmes ont déjà été victimes de violences sexistes ou sexuelles en ligne, et qu’elles sont 27 fois plus susceptibles d’être cyberharcelées que les hommes ?

Celebgate

En 2014, le Celebgate ou Fappening, une fuite massive de photos intimes de stars comme Jennifer Lawrence, Kirsten Dunst et Emma Watson, a déclenché un sexisme effréné sur les réseaux. Les hackers, ayant accédé aux comptes iCloud (coucou la cybersécurité) via de faux emails, ont divulgué ces photos, entraînant une enquête du FBI et quelques condamnations, mais l'instigateur n'a jamais été identifié. Ce scandale, originaire d'un forum obscur en 2013, a vu des photos vendues contre des bitcoins sur Reddit, mais le plan a échoué, rapportant seulement 120 dollars au coupable, toujours non identifié.

Sexualisation = Objectification ?

Quand les femmes sont constamment représentées de façon sexualisée, cela donne le feu vert à certains pour les traiter comme des objets plutôt que des personnes. C'est un peu comme réduire quelqu'un à une simple image, sans tenir compte de sa personnalité, de ses sentiments ou de son droit au respect. Cette objectification va souvent de pair avec le harcèlement, créant un cercle vicieux difficile à briser.

Des réseaux sociaux aux forums en ligne, les exemples ne manquent pas. Prenons Instagram : une plateforme visuelle où l'apparence est reine. Ici, les femmes sont souvent jugées, critiquées, voire harcelées sur la base de leurs photos. Et ce n'est pas qu'une impression : des études montrent une corrélation claire entre la sexualisation des images et l'augmentation des commentaires sexistes ou dégradants.

Post sur la cyberviolence subie par Lena Situations
Source : Association StopFisha (Association féministe de lutte le cybersexisme et les cyberviolences sexistes et sexuelles.)

Combattre le harcèlement en ligne

La prise de conscience est essentielle, mais l'action l'est encore plus. Sensibiliser les gens au cyberharcèlement et à l'objectification est un pas vers un Internet plus respectueux et inclusif, où chacun peut naviguer sans craindre d'être réduit à une simple image.

Influence des réseaux sociaux

Instagram et TikTok : les vitrines de l'idéal beauté

Instagram et TikTok, c'est un peu le royaume des filtres et des poses travaillées. Ces plateformes sont devenues des vitrines où les standards de beauté irréalistes sont non seulement montrés, mais aussi célébrés. Elles mettent en avant des images soigneusement retouchées, contribuant à une vision de la beauté presque inatteignable dans la vie réelle.

Retour sur l'histoire d'Essena O'Neill, ex-influenceuse d'Instagram, qui, en 2015, a délaissé les réseaux sociaux pour les effets négatifs sur sa santé mentale et son image corporelle. Aujourd'hui, elle est quasi-absente de ces plateformes, laissant derrière elle une trace digitale minimale. Son histoire illustre la pression et l'attention constante que peuvent générer ces espaces, même après s'en être écarté.

La quête de la perfection virtuelle

Sur ces plateformes, il n'est pas rare de se sentir comme dans une course à la perfection. Les 'likes' et les commentaires deviennent des indicateurs de notre valeur, poussant beaucoup à adhérer à ces standards irréalistes. Ce besoin constant de validation peut conduire à une obsession de l'apparence, et même à des comportements nocifs comme le body shaming.

Effet miroir sur les utilisateurs

L'impact va au-delà des écrans. Cette obsession de la perfection visible sur les réseaux sociaux influence la façon dont les utilisateurs se perçoivent et perçoivent les autres dans la vie réelle. Cela peut mener à une insatisfaction corporelle, à une insatisfaction de sa vie en général, et à une pression sociale accrue pour correspondre à ces idéaux.

Par ailleurs, la montée de la « culture du selfie » et la popularité des plateformes de médias sociaux comme Instagram et Snapchat ont considérablement influencé les normes de beauté, en particulier chez les jeunes femmes et les adolescentes. Ce changement culturel a conduit à une augmentation de la chirurgie esthétique, les individus cherchant à atteindre les apparences idéalisées souvent promues sur ces plateformes.

Pour un changement positif

Heureusement, il y a une prise de conscience croissante et un mouvement pour plus d'authenticité et de diversité sur ces plateformes. En reconnaissant leur influence, nous pouvons travailler ensemble pour promouvoir des standards de beauté plus réalistes et sains, et encourager une perception plus positive du corps et de soi.

Conséquences psychosociales

Au-delà de l'image : impact sur la santé mentale

La façon dont les femmes sont représentées en ligne ne touche pas seulement notre perception de la beauté; elle s'infiltre profondément dans notre psyché. Les images idéalisées et sexualisées peuvent entraîner des conséquences graves sur la santé mentale, comme l'anxiété, la dépression, et les troubles de l'image corporelle. C'est un peu comme un écho constant dans notre tête, nous rappelant ce que nous "devrions" être, et alimentant un sentiment d'insuffisance.

Relations sociales : le poids des attentes

Ces représentations influencent aussi nos interactions sociales. Elles créent des attentes irréalistes chez les hommes et les femmes, perturbant ainsi la dynamique dans les relations. On se met à évaluer les autres (et soi-même) à travers le prisme de ces standards inatteignables, ce qui peut mener à des malentendus, des jugements hâtifs, et une communication altérée.

La dynamique sociale en mutation

Dans une société hyperconnectée, ces images et idéaux circulent à une vitesse vertigineuse, renforçant les stéréotypes de genre et exacerbant les inégalités. Cela peut nuire à la solidarité féminine et encourager une compétition malsaine, où chacun se sent obligé de correspondre à ces modèles pour être accepté.

Vers une société plus saine

Il est essentiel de prendre conscience de ces effets. En parlant ouvertement des impacts psychosociaux de la représentation des femmes en ligne, on peut commencer à démanteler ces normes nuisibles. Cela nous mène vers une société où le bien-être mental et les relations saines sont prioritaires, libérés des chaînes de ces standards irréalistes.

Culture du "body shaming"

Body shaming : une ombre sur les réseaux sociaux

Le "body shaming", cette tendance à critiquer le corps des autres, est devenu un phénomène courant, surtout en ligne. C'est un peu comme si, cachés derrière nos écrans, certains se sentaient libres de juger et de commenter le physique des autres sans filtre ni empathie.

Des commentaires qui pèsent lourd

Sur les réseaux sociaux, un simple post peut attirer une avalanche de commentaires négatifs sur le corps. Que ce soit une célébrité ou une personne lambda, personne n'est à l'abri. Ces critiques peuvent aller de "tu es trop ceci" jusqu’à "tu n'es pas assez cela", créant une pression constante pour correspondre à un idéal souvent inatteignable. L’affaire « Hoshi » en est le témoignage douloureux : la chanteuse Hoshi avait subi une violente campagne de cyberharcèlement homophobe en 2020 à la suite de sa prestations aux Victoires de la musique. Un an après, elle avait été victime des propos déplacés de Fabien Lecoeuvre sur son physique.

Eemples de bodyshaming réseaux sociaux
Source : https://www.numerique-investigation.org/la-critique-systematique-des-personnes-percues-comme-femme-sur-les-reseaux-sociaux/4847/

Effets destructeurs sur l'estime de soi

Ce flux incessant de jugements n'est pas anodin. Il alimente l'insatisfaction corporelle et peut sérieusement affecter l'estime de soi. Chaque commentaire négatif est comme un petit coup porté à la confiance en soi, surtout chez les plus jeunes, qui sont particulièrement sensibles aux opinions des autres.

Vers une attitude plus bienveillante

Heureusement, la prise de conscience s'accroît. De plus en plus de personnes et de mouvements en ligne prônent l'acceptation de soi et le respect de la diversité corporelle. En mettant en lumière les méfaits du "body shaming", on encourage une culture en ligne plus positive et bienveillante, où chacun se sent à l'aise dans sa peau.

Stratégies de résistance et d'éducation

Des campagnes qui font la différence ?

La campagne #RealBeauty de la marque Dove en 2004 était précurseur de la lutte contre la représentation idéalisée des femmes sur internet, en mettent en avant des femmes de toutes formes, tailles et origines, défiant ainsi les normes de beauté traditionnelles. Elles encouragent l'acceptation de soi et inspirent à embrasser sa propre beauté, loin des standards irréalistes d’internet.

Bien que les réseaux sociaux tendent encore à standardiser l'image corporelle des femmes, la publicité fait un pas vers la diversité. Les campagnes récentes illustrent une gamme plus large de formes, de tailles et d'origines, contrastant avec les normes uniformes des médias sociaux et offrant une vision plus réaliste et inclusive de la féminité.

L'éducation pour un changement durable

L'éducation joue un rôle clé. Des programmes scolaires intégrant des cours sur l'estime de soi et la critique des médias aident les jeunes à déconstruire les images qu'ils voient en ligne et à développer une image corporelle saine. Ces cours fournissent les outils pour analyser et remettre en question les représentations médiatiques.

Une réponse pénale : élargir le délit d'outrage sexiste à Internet

Actuellement, l'outrage sexiste est peu sanctionné, car il nécessite une prise en flagrant délit par la police. Sur Internet, où de tels outrages sont fréquents, étendre ce délit au cyberespace renforcerait son efficacité. Cela soulignerait la gravité et l'illégalité des cyber outrages sexistes, rappellerait qu'aucun anonymat n'est garanti en ligne, et reconnaîtrait l'impact réel du sexisme en ligne. Cela contribuerait à mettre fin à la banalisation et à l'impunité des propos sexistes sur Internet.

Mise en lumière tribune sur une réponse pénale face à l'ampleur du sexisme en ligne
Source : Association StopFisha

Mesurer l'impact de ces actions

L'efficacité de ces initiatives se mesure à travers leur capacité à changer les mentalités. Bien qu'il soit difficile de quantifier leur impact direct, les témoignages et les retours positifs indiquent un mouvement grandissant vers une acceptation de la diversité corporelle. C'est un pas vers un monde où la beauté est vue dans sa pluralité, loin des clichés restrictifs.

Voix contre le sexisme sur internet : les gardiens de l’égalité

Voici  une petite liste des comptes qui dénoncent la sexualisation et le sexisme sur internet :

  1. L'association Stop Fisha a été créée pour lutter contre le cybersexisme et la cyber violence sexiste et sexuelle. @stopfisha sur Instagram. Si vous souhaitez en savoir plus sur le sujet de la cyberviolence, le livre Combattre le Cybersexisme est disponible dans toutes les librairies.
  1. Le site stop-cybersexisme lutte également contre le cybersexisme en offrant des outils pour mieux se protéger et signaler le cybersexisme en ligne.
  1. Pépite Sexiste : ce compte traque le sexisme ordinaire dans la publicité et la communication des marques, partageant des exemples de marketing sexiste et stéréotypé. Il interpelle directement les marques sur leurs erreurs sexistes et a obtenu des résultats concrets, tels que la révision ou le retrait de certaines campagnes​​.
  1. Dis bonjour sale pute : Ce compte dénonce le harcèlement de rue en agrégeant les témoignages de victimes, soulignant la vulnérabilité des femmes dans les espaces publics et leur réduction à l'état d'objets du sexisme​​.
  1. Punchlinettes : une plateforme pour compiler des punchlines en réponse au sexisme ordinaire, que ce soit dans l'espace public, privé, au travail ou en famille. Il sert de "guide de répliques anti-relous", aidant les femmes à répondre aux remarques sexistes​​.
  1. Dans la bouche d'une fille : ce compte défie les stéréotypes de genre en partageant les paroles sans filtre de femmes de tous âges, documentant les injustices et le harcèlement quotidiens. Il a également un livre manifeste abordant l'égalité des sexes​​.
  1. Préparez-vous pour la bagarre : dirigé par Rose Lamy, ce compte scrute et traque le discours sexiste dans les médias, soulignant comment le sexisme est souvent subtilement intégré dans le langage et contribue à la culpabilisation des victimes et à la déresponsabilisation des accusés​​.
  1. Le petit dernier pour du bodypositive drôle : Céleste Barber

Pour conclure

Il est important de prendre conscience de l'impact profond de la représentation des femmes sur Internet. Ces images et ces normes ne sont pas de simples pixels sur un écran, mais des reflets de notre société qui façonnent nos perceptions et nos interactions. Reconnaître ces problématiques n'est pas seulement crucial, c'est un pas vers la responsabilité collective. En nous engageant activement dans la remise en question de ces normes et en soutenant des initiatives qui célèbrent la diversité et l'acceptation de soi, nous avons le pouvoir de transformer notre environnement numérique.

Pour aller plus loin : Analyse 2022 – L’hypersexualisation des corps sur les réseaux sociaux : de violente à émancipatrice ?